mercredi 23 janvier 2013

Mama Poule


Sachez que j’adore ma famille. 
Surtout ma Mama. La péruvienne. Et tout particulièrement aujourd’hui.
Comme tous les matins, je m’assois à mon poste de travail dans mon bureau gris de La Défense grise (avec mon café-crème, mon pain au choc et ma non-envie de travailler) et, comme tous les jours, le premier mail que j’ouvre est le sien.
J’ai ce petit rituel le matin… bin quoi ? On peut être vieille avant l’âge non ?
Café-crème-pain-au-choc-de-grosse-et-mail-de-Mama.
Après ça, ma journée de non-travail au stalag peut commencer.
Ce mail commence toujours par « hola mi pericotito » (Note de Cathy : cela veut toujours dire « bonjour ma petite souris ») et entreprend, toujours, de me raconter les aventures qui se passent dans la maisonnée familiale, près de Lille, histoire que je n’oublie pas où est mon nid.
C’est toujours à peu près la même chose, mes frères pioncent, mon père travaille ou fait le jardin, Mama me parle de ses petits plats ou du Pérou.
Et grâce à ça, la-petite-souris-que-je-suis a l’impression d’être toujours avec eux (couper quoi ? le cordon ? QUEL CORDON ????)
Ce matin, le mail de Mama (traduit de l’espagnol, ponctuation comprise) disait :
« Hola mi pericotito j’espère que tu vas bien ici tout va bien Papa va partir au travail ton petit frère n’a pas cours je vais faire mon repassage hier soir une petite femelle faisane s’est explosée contre la fenêtre de la cuisine la pauvre petite le voisin va l’emmener pour en faire du pâté Gros bisous Ta Mama».
Non mais est-ce que tout le monde me suit ???? « La pauvre petite, on va en faire du pâté »
Ma mère est une indigène toute droit tombée d’un arbre. On a déjà bien de la chance qu’elle sache parler notre langue et on peut se dire qu’il est normal pour elle que les uns meurent pour que les autres survivent (l’histoire de la vie, ce cycle éternel, Mufasa et blablabla).
Elle aurait aussi pu dire que c’est la Pachamama (Terre-Mère en quechua) qui a voulu la mort de la petite femelle faisane pour que ma famille puisse survivre…
Soit.
OK, j’aurais compris. Après tout, je suis une souris.
Mais faire preuve d’un tel cynisme c’est INADMISSIBLE !!! « La pauvre petite, on va en faire du pâté ».
Inutile de vous dire que je l’ai appelée sur-le-pré, et failli me pendre quand elle m’a expliqué que mes frères s’étaient jeté dans ses jupes en s’écriant qu’un aigle (!!!!) s’était suicidé contre la maison…
Cette réaction est somme toute logique car, au final, nous sommes ses enfants. C’est normal qu’on réagisse comme des petits incas qui voient en cet acte un signe de la prochaine fin du monde de 2012 (en fait, petit frère numéro 2 aurait plutôt pensé à un hibou « et pourquoi pas un condor ? » qu’elle lui a répondu la Mama !!).
J’ai également froncé les sourcils et dit à Mama que c’était dégueulasse pour la petite femelle faisane.
Qu’elle avait beau faire preuve de cynisme (ce qui démontre clairement qu’elle s’est adaptée à notre civilisation judéo-chrétienne), elle n’est ni plus ni moins qu’une sauvage !
(En même temps je me demande comment ce stupide piaf a fait pour ne pas voir…. ma maison  ???????? au point de finir dans le double vitrage de la fenêtre de la cuisine…. Non mais elle n’est pas trop bête la faisane???? Ou aveugle ??? Ou alors elle voulait vraiment mourir. Elle avait peut-être le cœur brisé… Fallait pas en arriver là. Il y en a à la pelle des faisans, non ?)
Bon, tout ça pour dire :
- Que je pensais ma mère intégrée en France depuis le temps mais en réalité il y a encore du boulot.
- Que je ne comprends pas (et ne comprendrai jamais) comment mes frères ont pu mentionner les mots « aigle » ou « hibou » (mon père a même dit « faucon » !!!!) et même pas une seule fois le mot « poule »
- qu’en parlant de poule, je croyais que ma mère l’était. Sa non-solidarité vis-à-vis de la « petite femelle faisane » (également appelée poule faisane, en français non baragouiné) me laisse entendre qu’il faut que j’évite de lui tourner le dos. Du temps des Incas, on sacrifiait ses enfants pour moins que ça.


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